LE TISSU OSSEUX

L’os est un tissu conjonctif constitué de cellules dispersées dans une matrice extracellulaire
abondante, composée essentiellement de collagène de type I minéralisé constituant la partie
porteuse de l’appareil locomoteur.
Les os servent de charpente pour l’organisme, protègent les organes internes, et conjointement
avec les muscles organise le mouvement. Ils sont également impliqués dans la formation des cellules
sanguines au niveau de la moelle osseuse (hématopoïèse), le métabolisme phosphocalcique, le
stockage de minéraux et la régulation acido-basique.

1.1 ANATOMIE ET ORGANISATION MACROSCOPIQUE DU TISSU OSSEUX

1.1.1 Les différents types d’os

Les 206 os du corps humains peuvent être classés selon deux méthodes fondamentales. La première
repose sur la localisation anatomique de l’os, qui est axiale ou appendiculaire. La seconde est basée
sur la forme de l’os, dont on distingue 2 formes principales : les os longs (radius, tibia, fémur…) et
les os plats (crâne, omoplate, côtes…). Ces deux types d’os se distinguent aussi par leur mécanisme
de développement. Les os longs sont formés par ossification endochondrale, c'est-à-dire une
ébauche cartilagineuse qui est remplacée in fine par du tissu osseux. Quant aux os plats, ils sont
formés par ossification membranaire, sans ébauche cartilagineuse préalable. Nous nous
concentrerons dans ce travail essentiellement sur les os longs.

1.1.2 Anatomie d’un os long

Les os longs présentent un corps, ou diaphyse, et deux extrémités appelées épiphyses. La diaphyse
est constituée du tissu compact épais appelé cortex ou os cortical qui enveloppe le canal médullaire
rempli de moelle osseuse jaune. Dans l’épiphyse de l’os, recouverte de cartilage articulaire, on
retrouve l’os cortical qui enveloppe un compartiment rempli de moelle osseuse rouge
hématopoïétique, mais aussi de tissu osseux spongieux autrement appelé os trabéculaire. La zone
intermédiaire qui relie diaphyse et épiphyse est le siège de la croissance osseuse : c’est la
métaphyse, qui contient le cartilage de conjugaison ou cartilage de croissance. A la fin du processus
d’ossification endochondrale, c’est à dire à la fin de la croissance, ce cartilage est complètement
ossifié et n’est plus visible.
Figure 1 : Schéma d’une section longitudinale d’un os long.

1.1.3 Surfaces et compartiments osseux

L’enveloppe osseuse est constituée d’une couche dense de tissu calcifié, l’os cortical. C’est dans la
diaphyse qu’il est le plus épais, et progressivement il s’affine en passant par la métaphyse et
l’épiphyse. Ce compartiment cortical est calcifié à plus de 85%, les porosités qui y sont présentes
(<15%) sont le siège des vaisseaux sanguins.
Dans l’épiphyse, le compartiment médullaire contient un tissu osseux organisé d’un réseau de
plaques ou de poutres calcifiées. Ce sont les travées osseuses qui constituent l’os trabéculaire. Par
la suite, on désignera le compartiment médullaire comme le compartiment trabéculaire, dont le
volume est minéralisé de 20 à 40%. L’espace séparant les travées osseuses est occupé par de la
moelle osseuse, des vaisseaux sanguins, du tissu adipeux et du tissu conjonctif. Dans les cas
d’ostéoporose, le volume d’os minéralisé peut n’atteindre que 5 à 10% du volume trabéculaire.
La localisation majoritaire dans l’épiphyse de l’os trabéculaire fait qu’il ne compte que pour 20% de
la masse du squelette, alors que l’os cortical compte pour 80% de la masse osseuse totale.
La nature de l’activité métabolique osseuse est similaire pour l’os cortical et trabéculaire, et les
échanges avec les tissus mous environnants se font par le biais de deux surfaces. La surface externe
de l’os est appelée périoste, alors que la surface interne est appelée endoste. Plus précisément, on
peut diviser l’endoste en deux parties, la surface endocorticale et la surface trabéculaire.
Du fait de sa structure, l’os trabéculaire a une surface de contact avec les tissus mous qui est
beaucoup plus importante que dans le cas de l’os cortical. Les processus métaboliques de résorption
ou de formation osseuse se faisant par le biais de ces surfaces, l’intensité du métabolisme osseux est normalement plus importante dans l’os trabéculaire que l’os cortical. La conséquence de cela
est que les changements dus au vieillissement, à l’ostéoporose ou aux traitements, seront observés
en premier dans l’os trabéculaire.

1.2 STRUCTURE ET ORGANISATION MICROSCOPIQUE DU TISSU OSSEUX

Le tissu osseux, qu’on désignera plus simplement os par la suite, est constitué d’une matrice
extracellulaire et de cellules. La matrice extracellulaire peut se décomposer en deux phases : la
phase organique composée d’eau, de protéines de collagène et non-collagéniques, et la phase
minérale constituée de cristaux d’hydroxyapatite.
La composition relative de l’os varie selon le site squelettique, l’âge, la nutrition et éventuellement
les maladies atteignant l’os. En moyenne, la phase minérale compte pour 60 à 70% de l’os, l’eau
comptant pour 5 à 10%, le reste étant réparti entre les différentes composantes organiques. Par
ailleurs, la matrice osseuse n’est pas inerte car des cellules, les ostéocytes, y sont emprisonnées et
jouent un rôle dans le métabolisme du remodelage osseux

1.2.1 La matrice osseuse

1.2.1.1 La phase organique

La majeure partie de la phase organique, environ 90%, est constituée de protéines de collagène de
type I. Les 10% restant se partageant entre d’autres types de collagène, des protéines noncollagéniques,
de lipides et autres macromolécules.
Le collagène est une protéine ubiquitaire constituée de 3 chaînes polypeptidiques, chacune longue
d’environ 1 000 acides aminés. Le collagène de type I est lui constitué de deux chaînes 􀄮1
identiques et d’une chaîne 􀄮2, qui ensemble forment une triple hélice stabilisée par des molécules
de pontage entre les chaînes.

Figure 2 : Arrangement moléculaire du collagène de type I.
Structure lamellaire de l’os cortical et trabéculaire
Figure 3 : Structure lamellaire de l’os cortical et trabéculaire (1).
La Figure 2 présente l’organisation du collagène à différentes échelles. L’alignement parallèle de
plusieurs protéines de collagène permet d’obtenir une fibrille de collagène. On trouve au sein de
ces fibrilles des lacunes dans lesquelles se logeront les cristaux de minéral. Des fibrilles de
collagène alignées forment des fibres de collagène, qui elles mêmes s’arrangent en lamelle pour
constituer la matrice osseuse. Cela explique la structure lamellaire typique de l’os d’un sujet adulte
qui est illustré en Figure 4, et qui permet d’optimiser la densité de collagène au sein de l’os. Ces
lamelles sont déposées de façon parallèle le long de surfaces relativement planes comme le
périoste ou l’os trabéculaire, ou de façon concentrique lorsque l’os est déposé autour d’un vaisseau
sanguin comme cela peut être le cas dans l’os cortical.
Dans ce dernier cas, on nomme ostéon l’ensemble du vaisseau sanguin et des lamelles de matrice
osseuse qui l’entoure. Le diamètre de l’ostéon varie de 150 à 400 μm et peut mesurer jusqu'à 2 mm
de long. Les ostéons sont reliés entre eux par les restes des ostéons antérieurs, que l’on nomme os
interstitiel, ce qui permet de minimiser les espaces vides au sein de l’os cortical et lui assure donc
sa structure compacte (Figure 3).
On peut trouver une matrice osseuse dont la structure n’est pas lamellaire. C’est notamment le cas
lorsque l’os se forme rapidement par exemple lors de la croissance. Les fibres de collagènes sont
assemblées de façon anarchique et constitue alors un os immature qu’on appelle os tissé (Figure 4).
Ce type d’os est totalement remplacé par l’os lamellaire à la fin de la croissance et est donc
normalement absent chez le sujet adulte. Néanmoins on peut retrouver de l’os tissé sous certaines
conditions pathologiques comme la maladie de Paget, certaines métastases osseuses, ou encore au
niveau des cals de fracture.
Pour les protéines non collagéniques qu’on trouve dans l’os, on peut citer l’ostéocalcine,
l’ostéonectine (2,3), l’ostéopontine ou encore la sialoprotéine osseuse, dont les rôles précis restent
à étudier.
Figure
Différence de structure entre os tissé (A) et os lamellaire (B).
Figure 4 : Différence de structure entre os tissé (A) et os lamellaire (B).

1.2.1.2 La phase minérale

Le composant minéral majeur de l’os est le phosphate de calcium, qu’on trouve sous forme
cristalline d’hydroxyapatite de calcium [CA10(PO4)6(OH)2]. Ce cristal peut aussi contenir d’autres
ions que des carbonates, du magnésium, potassium, strontium, sodium ou fluor. Ce cristal d’apatite
est généralement plat, épais de 2 à 5 nm et long de 20 à 80 nm (4). Un os nouvellement formé est
moins minéralisé et possède des cristaux plus petits qu’un os âgé (5). Les rôles précis de la taille et
de la perfection des cristaux sur l’intégrité de l’os ne sont pas encore déterminés, mais les écarts
par rapport à la moyenne de la taille des cristaux pourraient avoir des effets sur les propriétés
biomécaniques de l’os (6).
Des substances telles que la tétracycline, les polyphosphates et les bisphosphonates ont une
importante affinité avec le phosphate de calcium, et donc par extension avec l’os. Ces affinités ont
des applications importantes et différentes. Les polyphosphates peuvent être utilisés en médecine
nucléaire combiné à du (99m)technétium, marqueur radioactif, qui permet de visualiser les sites
actifs de formation osseuse pour diagnostiquer certaines fractures et tumeurs osseuses (7). La
tétracycline est un produit fluorescent, qui se fixe sur les sites de formation osseuse et permet donc
de les visualiser en histologie (8,9). Les bisphosphonates, connus pour leur action anti-résorptive sur
l’os, ont également une grande affinité pour l’os (voir Chapitre 2) (10-13).

1.2.2 Les cellules osseuses

Les cellules osseuses les plus communes sont les ostéoblastes, les ostéocytes, les ostéoclastes et
leurs précurseurs respectifs. Chacune de ces cellules a une morphologie et une fonction unique dans
le métabolisme osseux, qui consiste en des cycles successifs de dégradation et de formation des
surfaces osseuses. C’est ce qu’on appelle le remodelage osseux, qui est un processus qui a lieu en
permanence à l’âge adulte, et qui permet au squelette de se régénérer tout au long de la vie.

1.2.2.1 Les ostéoblastes et la formation osseuse

Les ostéoblastes sont les cellules actrices de la formation osseuse. Elles dérivent de cellules souches
d’origine mésenchymateuse. Ces cellules souches peuvent se différencier en pré-ostéoblastes, qui
aboutiront aux ostéoblastes matures. Les ostéoblastes, cellules de formes cubiques, se groupent sur
la surface osseuse (par 100 ou 400 cellules par site de formation osseuse) où elles sécrètent des
fibres de collagène non minéralisée, qu’on appelle os ostéoïde, la minéralisation ayant lieu dans un
second temps. Lorsque l’os ostéoïde est complètement déposé, les ostéoblastes meurent par
apoptose dans 65% des cas (14,15). Dans les autres cas, ils peuvent se reconvertir pour devenir des
ostéocytes s’ils se trouvent emprisonnés dans la matrice osseuse, ou alors en cellules bordantes s’ils
sont situés au contact de la matrice ostéoïde. La technique de double marquage à la tétracycline
permet de mesurer la vitesse de minéralisation à environ 0,7 μm/jour.
Vue des différents types de cellules osseuses et leur localisation respective sur la surface osseuse sur une coupe d’histomorphométrie, coloré par le trichrome de Goldner. En vert, le tissu osseux minéralisé. En brun foncé, l’os ostéoïde non minéralisé.
Figure 5 : Vue des différents types de cellules osseuses et leur localisation respective sur la surface
osseuse sur une coupe d’histomorphométrie, coloré par le trichrome de Goldner. En vert, le tissu
osseux minéralisé. En brun foncé, l’os ostéoïde non minéralisé.

La prolifération, la différenciation et l’activité des ostéoblastes sont influencées par de nombreuses
hormones, comme les oestrogènes et les androgènes, l’hormone de croissance, la 1,25-dihydroxy
vitamine D3, l’hormone parathyroïdienne et la leptine, ainsi que par de nombreux facteurs de
croissance, TGF-􀈕, IGF-1, protéines morphogéniques osseuses, et cytokines IL-1 et IL-6. La quantité
d’os ostéoïde formé dépend fortement du nombre d’ostéoblastes impliqués dans le site de
formation. Alors que le processus de minéralisation se fait de façon passive, indépendamment des
cellules osseuses. La minéralisation peut se diviser en deux étapes : une étape primaire au bout de
laquelle (quelques mois) la matrice ostéoïde atteint 50 à 60% de sa minéralisation totale, et une
étape secondaire au cours de laquelle le processus est beaucoup plus long. Il peut se passer des
années avant que la minéralisation complète n’atteigne son maximum (16). Ce niveau maximum est
largement dépendant du taux de remodelage osseux. Dans le cas d’un remodelage osseux élevé l’os
peut se trouver relativement hypominéralisé, tandis que lors d’un remodelage osseux faible la
minéralisation secondaire peut durer plus longtemps et aboutir à un degré de minéralisation plus
élevé.

1.2.2.2 Les ostéocytes

Comme indiqué précédemment, les ostéocytes sont des ostéoblastes qui se retrouvent emmurés
dans la matrice de collagène qui vient d’être déposée. Les ostéocytes sont situés dans des lacunes
ostéocytaires, qui se trouvent être au carrefour de nombreux et fins canalicules qui parcourent
l’ensemble du tissu osseux (15,17,18). Ces canalicules sont le siège d’écoulement de fluide
extracellulaire, dont les variations de pressions jouent un rôle dans l’activation d’un cycle de remodelage osseux ciblé. Une microfissure au sein de l’os, coupant l’un ou plusieurs de ces
canalicules, active les ostéocytes qui signalisent le site de la microfissure, de telle sorte que par le
biais du remodelage osseux le site endommagé soit remplacé par un os osteoïde neuf (18). Les
ostéocytes ont donc un rôle de mécanotransduction qui participe au maintien de l’intégrité
mécanique de l’os.
Les ostéocytes.
Figure 6 : Les ostéocytes.

1.2.2.3 Les ostéoclastes et la résorption osseuse

Les ostéoclastes sont les cellules actrices de la résorption osseuse. Ils sont caractérisés par leur
grande taille, dont le diamètre varie de 20 à 100 μm, et le fait qu’ils sont multinucléés. Leur
contact avec l’os est caractérisé par la présence d’une bordure plissée, entourée de protéines
contractiles qui assurent le contact avec la surface osseuse créant ainsi un micro-environnement
dans lequel se déroule la résorption osseuse (15,19). Des enzymes, des protéases (cathepsine et
métallo-protéases) et de l’acide chlorhydrique sont sécrétés au travers de la bordure plissé et
permettent la dégradation de la matrice osseuse (20).
Contrairement aux ostéoblastes, les ostéoclastes sont dérivés de cellules pluripotentes de la moelle
osseuse, dont découle aussi la lignée des monocytes et macrophages. La différenciation en préostéoclastes
puis en ostéoclastes matures est gouvernée en partie par un système de 3 molécules :
RANK (receptor activator of nuclear factor kappa B), RANKL (receptor activator of nuclear factor
kappa B ligand), et OPG (ostéoprotégérine).
RANKL est situé dans la membrane plasmique des ostéoblastes et sur les cellules stromales de la
moelle osseuse. OPG est pour sa part sécrétée par les ostéoblastes. Ces deux molécules sont en
compétition pour la liaison avec RANK, récepteur qui se trouve dans la membrane des préostéoclastes.
RANKL stimule la différenciation en ostéoclaste, alors qu’OPG inhibe cette
différenciation (15,21). Ceci montre un des aspects du couplage entre formation et résorption
osseuse, sur lequel nous reviendrons par la suite.
Le système d’interaction entre RANK, RANKL et OPG.
Figure 7 : Le système d’interaction entre RANK, RANKL et OPG.
L’ensemble de la différenciation des ostéoclastes est influencé par de nombreuses hormones,
facteurs de croissance et cytokines. Le nombre des ostéoclastes définit l’intensité de l’activité de la
résorption qui se renforce avec l’âge, ce qui est une des cibles privilégiées des traitements contre
l’ostéoporose.

1.2.3 Le modelage et le remodelage osseux

Le modelage osseux, qui a lieu notamment pendant la période de croissance du squelette ou lors
des réparations fracturaires, est un processus de formation osseuse, non précédé de résorption
osseuse. On peut aussi noter qu’avec l’âge il existe une croissance très lente du périoste qui
augmente par conséquent la section de l’os, et qui répond au principe de modelage osseux.
En comparaison, le remodelage osseux est un processus cyclique continu de résorption suivi de
formation osseuse. Ce métabolisme prend le relais du modelage osseux lorsque la phase de
croissance est terminée. Un cycle de remodelage osseux démarre par une phase d’activation
pendant laquelle sont générés les ostéoclastes, qui détruisent la matrice osseuse pendant la phase
de résorption avant d’entrer en apoptose. S’ensuit une phase d’inversion pendant laquelle les
ostéoblastes sont générés puis prennent place dans la cavité précédemment creusée par les
ostéoclastes. La phase de formation osseuse peut avoir lieu, pendant laquelle les ostéoblastes
déposent des fibres de collagènes sous forme lamellaire et non minéralisée. Enfin une phase de
repos, ou de quiescence, termine le cycle pendant laquelle les ostéoblastes peuvent entrer en
apoptose, devenir des ostéocytes ou des cellules bordantes à la surface de l’os. L’ensemble du site
osseux soumis au remodelage osseux est appelé unité multicellulaire de base (BMU), qu’on appelle
également unité de remodelage.

Figure 8 : Le processus de remodelage osseux.
Chez l’adulte en général, la phase de résorption dure 5 à 10 jours. La phase d’inversion dure 30 à 35
jours et alors que la phase de formation peut prendre de 50 à 100 jours. Un cycle de remodelage
osseux peut donc prendre de 3 à 6 mois. On estime que 5 à 10% du squelette est renouvelé chaque
année du fait du remodelage osseux. Comme nous l’avons vu plus haut, il existe de nombreuses
voies de couplage entre résorption et formation osseuse, qui font du remodelage osseux un
processus équilibré chez un adulte sain. Cet équilibre est essentiel d’un point de vue métabolique
car il permet de remettre en circulation du calcium dans le reste du corps et ainsi assurer
l’homéostasie calcique : en effet le squelette contient 99% du calcium stocké dans le corps humain.
La majeure partie du remodelage survient au hasard, on parle alors de remodelage stochastique.
D’autre part, le remodelage ciblé, déclenché par les microdommages perçus par les ostéocytes,
permet de réparer les sites endommagés.
Dans certaines conditions pathologiques, ou avec le vieillissement, cet équilibre
résorption/formation osseuse est perdu avec un bilan souvent négatif en faveur de la résorption
osseuse, synonyme de perte osseuse. Les traitements anti-ostéoporotiques peuvent aussi altérer
temporairement les cycles de remodelage osseux. Par exemple, un traitement par bisphosphonates
inhibe dans un premier temps la résorption osseuse, puis dans un second temps la formation
osseuse. Dans l’intervalle de temps, le bilan du remodelage osseux devient positif conduisant à un
gain de masse osseuse, grâce au comblement de l’espace de remodelage (15).
Le remodelage osseux se passe de façon identique pour l’os cortical ou trabéculaire. Cependant la
différence entre la quantité de surface de l’os trabéculaire par rapport à l’os cortical fait qu’il y
règne une activité de remodelage 5 à 10 fois plus importante à la surface de l’os trabéculaire.
Comme nous l’avons mentionné, le remodelage osseux est un mécanisme qui permet au squelette
de répondre aux charges mécaniques auxquelles il est soumis et d’effectuer les réparations des sites
endommagés. Depuis la fin du XIXè siècle, les anatomistes ont montré que la structure de l’os
trabéculaire, qu’on désignera microarchitecture trabéculaire par la suite, est préférentiellement
orientée selon les directions des charges principales appliquées à l’os. Cette capacité remarquable
de l’os à organiser sa structure interne en fonction de l’environnement mécanique extérieur a été
formulée la première fois par Julius Wolff en 1896, connue aujourd’hui comme la loi de Wolff (22).
Elle sera reprise plus tard par Harold Frost en 1960, qui la reformule en incluant dans le système
d’interactions mécaniques non seulement les muscles et les os, mais aussi les cartilages, tendons,
ligaments et fascia (23). Au contraire de Wolff, les travaux de Frost, connus sous les noms de
mécanostat ou paradigme d’Utah, sont orientés sur les applications cliniques qui en découlent, et
sont régulièrement réactualisés.
Le mécanostat de la physiologie squelettique, ou paradigme d’Utah.
Figure 9 : Le mécanostat de la physiologie squelettique, ou paradigme d’Utah.

Le mécanisme précis expliquant les observations de Wolff et de Frost est un vaste sujet qui reste à
étudier dans les détails. Parmi les causes d’origine mécanique qui jouent un rôle sur le remodelage
osseux, on peut noter la formation de microfissures dans l’os. Ces microfissures sont le résultat
d’une « fatigue » de l’os, dues à une accumulation excessive de charges mécaniques subies. De
récentes études montrent que les sites de ces microfissures font l’objet d’un remodelage osseux
ciblé (24). Comme nous l’avons évoqué plus haut, les microfissures peuvent entraîner la rupture des
canalicules qui constituent des extensions des ostéocytes présents au sein de l’os. Suite à de telles
ruptures, les ostéocytes entrent en état de mort cellulaire, déclenchant une signalisation qui attire
les ostéoclastes à cet endroit et permet de démarrer localement le remodelage osseux. La
résorption a alors lieu jusqu'à l’endroit de la microfissure qui disparaît dans le processus. L’os ostéoïde nouvellement formé remplace alors l’os précédemment endommagé, et en constitue la
forme réparée (25). Ce mécanisme de remodelage ciblé peut se trouver altéré avec l’âge, le
nombre des microfissures non réparées augmentant, cette altération peut compromettre la solidité
de l’os (26).

1.3 CONCLUSIONS

L’os est un tissu vivant, qui se modèle et se remodèle en fonction des contraintes mécaniques
extérieures auxquelles il est soumis. Les principaux acteurs du remodelage sont les ostéoblastes et
les ostéoclastes, qui déclenchent les mécanismes biochimiques de formation et de résorption de
l’os. Plus précisément, il s’agit du dépôt et de la dégradation d’une matrice de collagène, dans
laquelle s’insèrent les cristaux d’hydroxyapatite qui minéralisent l’os.
Le remodelage osseux est donc un métabolisme dynamique et interactif, qui est équilibré en termes
de résorption et de formation osseuse à l’âge adulte. Ses perturbations à toutes les échelles
peuvent compromettre l’intégrité mécanique de l’os : mutation du collagène, défaut de
différenciation des ostéoblastes ou ostéoclastes, ou défaut de mécanotransduction par exemple.
L’ostéoporose, qui fait l’objet du Chapitre 2, est une des maladies qui affecte le squelette. Son
action sur le remodelage osseux en faveur de la résorption osseuse, fait souvent suite à un
dérèglement hormonal notamment lors du vieillissement. Ce déséquilibre est synonyme de perte de
matériel osseux, qui fragilise l’os et peut conduire à une ou plusieurs fractures.

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